52 huiles sur toile de C Monet sur les meules (Giverny)

La poésie de l'univers

52 huiles sur toile représentent le thème des Meules, qu'elles soient de foin (14), de paille (18 doubles et 17 simples, soit 35 en tout) ou simplement des gerbes de blé (3). Ce thème localisé à Giverny a été utilisé par C Monet pendant une quinzaine d'années, de 1884 à 1909. La série des Meules, au sens strict, comprend 27 tableaux qui se suivent (W 1266 à 1290, plus deux non répertoriés et sans W 1217a brûlé lors de l'incendie de San Francisco en 1906), composés de 1890 à 1891. Une quinzaine en sera exposée dès mai 1891, le cadre tour à tour en gros plan, plan moyen ou général, se déplaçant de toile en toile. Tout indique, dans cette série, un long travail d'élaboration et de reprises qui n'a rien de commun avec le primesaut d'une notation fugitive.

Il est manifeste que C Monet s'y intéresse aux rapports de la forme et du cadre, l'échelle de la figure lui important, comme les proportions de la surface, autant que les observations atmosphériques. La variété des alignements, des cadrages et des échelles, conjuguée aux différents formats de toile, est le reflet des préoccupations de C Monet en quête d'une peinture plus décorative, et qui explore les possibilités de jeux entre la forme du sujet peint quasi géométrique et le rectangle de la toile. Curieusement, bien avant les Nymphéas, peut déjà s'y constater l'effacement de l'objet et de la forme.

"Je vécus un évènement qui marqua ma vie entière et me bouleversa jusqu'au plus profond de moi-même. Ce fut l'exposition des impressionnistes à Moscou [1896] - en premier lieu la Meule de foin de C Monet [a priori W 1288, puis W 1284 (en 1900) à la Sécession de Munich où il habitait depuis 1897]... Et soudain, pour la première fois, je voyais un tableau... Je sentais confusément que l'objet faisait défaut... Tout ceci était confus pour moi, et je fus incapable de tirer les conclusions élémentaires de cette expérience. Mais ce qui m'était parfaitement clair, c'était la puissance insoupçonnée de la palette qui m'avait jusque-là été cachée et allait au-delà de tous mes rêves." (cf. W Kandinsky , rapporté par J Clay).

C Monet nous "donne la sensation de l'instant éphémère, qui vient de naître, qui meurt et en même temps... évoque sans cesse... la courbe de l'horizon, la rondeur du globe, la course de la terre dans l'espace..., (nous fait dialoguer avec les grands rythmes de la terre, dixit J Clay), résume la poésie de l'univers dans un espace restreint" (G Geffroy à l'exposition de 1891).